Monde de merde.

C'était un samedi plutôt calme à Central. Surtout en considérant qu'il n'y a pas si longtemps, une partie de la ville avait été ravagée par une attaque terroriste. Les gens s'étaient soutenus, s'étaient hébergés les uns les autres, avaient rendu hommage aux victimes, et semblaient être liés comme une grande famille, dans toute la capitale. Les différences de culture, de couleur, et toutes ces choses qui ont tendance à nous séparer avaient disparu.
Seulement voilà, l'humanité n'apprend jamais de ses erreurs, et comme bien souvent, ce temps de paix n'a duré qu'une semaine, tout au plus. Après ça, les fleurs ont à nouveau été remplacées par des insultes, et tous ces êtres égoïstes ont cessé de se préoccuper des autres. L'hypocrisie humaine. Si je peux décrocher un article dans le journal, je suis ton ami, si tu ne m'es d'aucune utilité, tu peux bien crever, je m'en fous. A chaque coup dur dans ce pays, c'est la même chose. Heureusement qu'ils ne sont pas au courant qu'un Xinois est impliqué, information que j'ai "malencontreusement entendue" au détour d'une conversation entre deux militaires, sinon toute la communauté xinoise aurait la population de Central à dos. Il suffit d'un seul extrémiste pour que toute une ethnicité s'en prenne plein la gueule. Ishval, c'était la même chose. Un blanc a tué un enfant Ishval, tous les blancs sont responsables. Les conflits se suivent et se ressemblent. Monde de merde.

Moi, je me contente d'observer tout ça d'en haut. Qu'ils s'entre-tuent s'ils le veulent, ces idiots. Tant qu’ils ne viennent pas me déranger pendant que je mange mon sandwich, sur ce toit. Depuis quelques jours, je me suis surprise à penser. A cet attentat. A ses conséquences. A mes deux Xinoises préférées. Malagan et moi nous étions dit au revoir quelques semaines plus tôt, je me demandais ce qu’elle était devenue, et ce qu’avait fait Inaku. Si la population de Central venait à apprendre qu’un Xinois a participé aux attentats, elles pourraient être en danger, si elles repassaient par ici. Il fallait que j’en parle à mon troisième Xinois préféré, Aiko.
Ainsi, je me rendis dans mon établissement préféré, celui où il travaillait comme serveur, et où je l’avais retrouvé un mois auparavant. En arrivant, je fus accueillie par le gérant, comme d’habitude. Il me servit mon fameux verre de jus de pomme, et alla chercher Aiko lorsque je lui demandai où je pouvais le trouver. Mon ami arriva quelques minutes plus tard et s’installa à côté de moi.
- Ça f’sait longtemps.
- Comme tu dis. Tu voulais me voir ?
- Ouep. T’as des nouvelles d’Inaku et Malagan ?
- J’ai reçu une lettre d’un certain Kazu l’autre jour.
- C’est leur père adoptif, et un ami à moi.
- Elles lui ont écrit, et lui ont demandé de me faire parvenir les infos.
- Et quelles sont les nouvelles ?
- Malagan est partie à Xing, elle voulait récupérer des affaires abandonnées à leur départ, et essayer de rentrer en contact avec d’anciens amis de leurs parents. Inaku l’a suivie un peu plus tard, en emmenant le petit avec elle. Elles n’ont pas l’intention de revenir pour le moment.
Je posai mon verre sur le comptoir et me levai.
- Bien, merci pour l’info. Ça ira pour toi ?
- J’ai bien tenu pendant des années, je devrais m’en sortir.
- T’es un courageux, lui dis-je en souriant.
- On fait c’qu’on peut. Allez, bonne fin de journée.
- Attends. Avant que je reparte, il faut que je te parle d’un truc. Mais tu dois impérativement garder ça pour toi. J’ai entendu des militaires parler des attentats de l’autre fois. Selon eux, un Xinois serait impliqué. Fais attention, si l’info est relayée aux civils, tous les gens ayant des origines xinoises pourraient être discriminés, et tout ce que ça implique.
- D’accord. Je ferai attention.
Je quittai l’établissement en le saluant de la main. Ce jour-là, j’avais obtenu ce que je voulais, et en plus de ça, j’avais fait une bonne action. Que demande le peuple ?