Il pleut et la nuit est déjà bien tombé depuis plusieurs heures. Dans une ruelle sombre, un homme est assis sur le sol à respirer bruyamment alors qu'il se tient la tête comme si quelque chose allait en sortir. Il a faim et soif, cela fait plusieurs jours qu'il fuit quelque chose, le laissant à peine en état pour tenir debout.

Mais il refuse d'abandonner, quelque chose en lui le pousse à ne pas se laisser faire. Un désir de combattre et lutter pour sa survie rugit mais contre quoi . Oui il peut s'autoriser un moment pour se reposer et fermer les yeux, après tout il a le droit, le droit de se souvenir de ce qu'il lui manque.

Un petit enfant vint au monde, pleurant alors que son nom fut décidé en avance : Escanor. En soi son père et sa mère se voulaient plutôt normaux ou du moins aucunement anormaux.

Rien ne semblait mal se passer pour un début de vie et cas où l'on peut se demander où est-ce que ça se passe, il y a de ça 36 ans dans une ville d'Aerugo. La famille d'Escanor était plutôt noble mais pas non plus riche, juste ce qu'il fallait pour vivre convenablement.

Et si l'on devait se demandait ce que faisaient le père et la mère pour gagner leur vie, la réponse est très simple : la famille Von Carstein a pour tradition de s'être voué à étudier et à comprendre la biologie, et sans aucun doute à trouver le remède universel. Le tout en étant des membres du corps médical ou autrement dit : des médecins.

Ainsi Escanor fut éduqué dans un milieu où on lui expliquait qu'il devra se consacrer à aider et sauver les gens quand il sera en âge de pratiquer. Très jeune, il assistait ici et là à quelques séances de soin non pas alchimiques mais juste de soin dans sa pratique la plus manuelle qui soit.

Non seulement on lui apprit petit à petit comment soigner les petits bobos comme les simples coupures, mais aussi les valeurs morales que des gens versés dans la médecine ont. Mais Escanor éprouva le besoin d'en apprendre bien plus que juste savoir mettre un bandage sur un bras, son désir d'en savoir plus ne cessait de grandir tout comme lui au fur et à mesure que les années passèrent.

Mais entretemps, une rencontre allait signer son futur vers une direction qui allait encore à ce jour le marquer aussi bien positivement que négativement.

Un jour, alors qu'il était suffisamment âgé pour se débrouiller tout seul à la maison et que ses parents devaient aller en urgence à l’hôpital, un bruit venant de la cuisine se fit entendre. Croyant là qu'il s'agissait de son père ou de sa mère, Escanor sortit de sa chambre pour aller les voir.

Au lieu de l'un ou l'autre, il vit une petite fille qui semblait subtiliser la nourriture qui était conservée. Si au premier abord, il n'osa pas se manifester par peur, il se lança à sa rencontre. Bloquant la seule issue, Escanor ne laissa pas le choix de rester dans la cuisine.

Quelques minutes plus tard

Les voilà tous les deux à manger une pomme à table en discutant. Non seulement il savait à présent qu'elle se nommait Livia, mais en plus elle disait qu'elle cherchait son père. Et puis... Escanor était quelque peu embarrassé de parler comme ça à une fille. Mais en soi tout se passait bien jusqu'à que cette dernière doive repartir rechercher son père. Le jeune garçon lui demanda de revenir quand elle voudra si elle retrouvait son père.

Et c'est ce qu'elle fit par la suite, lui annonçant qu'elle avait bel et bien retrouvé son père alors qu'Escanor déclara qu'il se présentera à l'académie militaire pour faire en sorte d'améliorer ses connaissances tout en se mettant au service de sa nation.

Tout le long de ses études afin de préparer sa présentation et s'assurer qu'il avait plusieurs atouts dans sa manche pour être sûr d'être pris à l'académie militaire, Livia lui rendit plusieurs fois visite. Et comme à chaque fois, Escanor ne savait pas où se placer ni comment se comporter sans se sentir bête. Pourtant il ressentait le besoin de l’impressionner comme si ça avait une grande importance.

Plusieurs années plus tard, quand vint enfin le temps de présenter ses théories et de faire ses preuves à l'académie, Escanor devint nerveux et pas du tout sûr de lui. Mais les encouragements de Livia le poussèrent à ne pas se laisser abattre et d'y croire dans ce qu'il désirait.

Après avoir passé son examen d'entrée.

Le jeune homme montre ainsi à son amie et à ses parents son papier d'admission ainsi que son badge donnant son rang dans le corps militaire comme chercheur novice. L'évènement fut fêté dans la joie alors qu'en cet instant, il comprit que Livia n'était pas juste une simple amie à ses yeux. Mais pourtant il ne se sentait pas capable d'oser en parler comme si le faire allait briser quelque chose. Quitte à prendre sur lui, il garderait tout ça en lui, ça lui allait.

Son nouveau travail avait le don de le rendre totalement curieux sur un maximum de sujet et il n'hésita pas à prendre des initiatives qui surprenaient ses supérieurs. Que ça soit par ses idées ou bien dans sa volonté de toujours faire de son mieux, Escanor fit au fur et à mesure ses preuves. Et quand il rentrait, c'était parfois pour y voir Livia qui l'attendait pendant qu'il racontait ses journées de travail.

Tout allait pour le mieux, même en n'osant toujours rien dire après toutes ces années à Livia. Et même après s'être pris une maison, il restait silencieux, ça lui convenait toujours. Rester amis lui plaisait toujours autant, ça ne faisait pas de mal à Livia et c'est ce qui comptait le plus à ses yeux.

À côté de ça, sa carrière professionnelle grimpa au point où il fut promu chercheur dans le domaine médical et biologique, ayant même sa propre équipe à sa charge. Rien ne semblait lui être impossible dans ce qu'il entreprenait, tout lui souriait. Une maison où vivre, des collègues qui l'aimait bien, des parents encore en vie, une amie qui comptait à ses yeux. La belle vie par excellence.

Qu'est-ce qui pourrait mal se passer ? Où est-ce que sa vie se renversa totalement ?

Un jour parmi tant d'autres.

Escanor était en jour de pause, la semaine fut assez chargé mais assez gratifiante. Le soleil brillait et pas le moindre signe de nuage à l'horizon, la ville respirait la vie avec son flot de gens et de bruits divers et variés.
Et dans tout ceci, un homme fut pris d'une dose de courage suffisamment grande pour entreprendre ce qu'il ne pensait pas faire. Se rendre dans un bijoutier pour demander une bague à offrir en guise de demande en fiançailles après en avoir discuté avec plusieurs collègues dans un bar.

Une petite boîte carrée dans sa main, un costume propre et voilà Escanor prêt à se rendre chez Livia. Non seulement cette fois c'était lui qui se rendait chez elle, mais en plus il devait se surpasser pour dire ce qu'il retenait durant tout ce temps.

Tout ce qu'il savait, c'est qu'il se sentait trop nerveux même en sachant qu'il pouvait très bien se désister et ne lui rien dire à propos de ses intentions. Au moins aller avec elle dans le salon pour y boire un thé ne lui posait aucun souci. Mais quand il bu sa tasse de thé, il se lança et lui dit qu'il avait quelque chose d'important à lui avouer depuis longtemps.

Sauf... Que quelque chose n'allait pas, une sensation étrange anesthésia son corps alors qu'il tenta de se rattraper sur la table péniblement en étant dans la confusion la plus totale. Tout ce qu'il vit à cet instant fut Livia qui se pencha sur lui pour lui donner un baiser et lui dire de faire de beaux rêves et qu'il ne regrettera rien. Ainsi Escanor sombra dans l'inconscience.

A partir de là, sa mémoire est brumeuse, le laissant désemparé et incapable de comprendre.

Il se souvient de la peur, de la crainte, des cris, d'une douleur perçante et impossible à contenir. Il se souvient des suppliques, des pleurs, du souhait de mourir et de ne plus avoir mal. Il se souvient d'avoir eu le coeur brisé mais de ne pas pouvoir s'empêcher d'avoir l'espoir que tout s'arrête.

Il se souvient du battement de son coeur qui résonnait dans son corps entier, de cette voix qu'il connaissait lui parler, suppliant à cette dernière d'arrêter encore et encore à chaque fois que la douleur revenait.

Cela durait peut être durant des jours ou bien des semaines mais c'était trop pour son esprit qui souhaitait s'en aller et sortir de ce qu'il lui arrivait. Il se souvient même par moments où il était persuadé d'être autre chose qu'une personne qui priait pour qu'on mette fin à ces douleurs qui ne cessaient pas de revenir encore et encore.

Puis un cri inhumain, un bruit de porte que l'on force et des pas lourds dans le sol à toute allure se firent entendre. Quelque chose se passa et l'esprit d'Escanor retourna à un état de conscience suffisamment fort pour voir qu'il était sur le bord d'une route, des vêtements en lambeaux ainsi qu'une faim et une soif qui lui rappela les besoins les plus primaires pour survivre.

Il tremblait et avait froid, la pluie qui tombait le frappait et le garda conscient. Marcher et marcher, encore et encore, toujours plus sans vraiment saisir tout ce qu'il lui était arrivé. Juste revenir chez lui et... Non il ne pouvait pas, car lui-même ne savait pas vraiment si revenir là où il vivait était une bonne idée.

Puis où était-ce déjà chez lui ? Avait-il vraiment un endroit où il s'y sentait en sécurité ? Tout lui semblait hostile et dangereux, du moindre bruit au fait de voir le soleil se coucher, rien ne le rassurait.

Combien de temps cela avait-il duré jusqu'à ce qu'il retrouve enfin la civilisation ? En lui quelque chose grondait, son sang bouillonnait et lui tambourinait les tempes. Elle devait savoir ce qu'il lui était arrivé puis trouver un moyen de le rendre comme avant. Et si elle ne pouvait pas, alors il chercherait jusqu'à atteindre son but avant de se sentir envahit par ce qui est en lui et qui profite du moindre moment de faiblesse pour se manifester.

Le temps lui est compté et il ignore la quantité. Mais il restera lui-même jusqu'à la fin.

Quelque part dans une ruelle, pleine nuit

Il ouvre soudainement les yeux, les visions d'horreur ne s'arrêtent pas et la faim l'a réveillé. Se levant, il se remet à partir en chancelant, ne sachant pas du tout où il va mais peu importe. Il trouvera un moyen d'aller mieux.

Spoiler:

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